Ne rend pas honneur à ces jeux

Je crois que c’est important de le dire d’entrée, je n’avais jamais joué aux Soul Reaver à l’époque de leur sortie. Ils faisaient partie de ces jeux dont j’entendais beaucoup parler, qui revenaient souvent dans les discussions des trentenaires ionnés avec des étoiles dans les yeux, comme s’ils étaient le chaînon manquant entre Zelda, Tomb Raider et la dark fantasy façon Legacy of Kain.

J’avais donc un vrai plaisir à enfin pouvoir les découvrir aujourd’hui, en 2025, avec cette compilation signée Aspyr. Enfin… Aspyr média nous a déjà proposé mieux et ici, ils ne nous régalent pas des masses...

Parce que franchement, cette version remasterisée est l’une des plus paresseuses que j’ai pu voir ces dernières années.

Pourtant, je suis indulgent avec les jeux rétro. J’aime comprendre pourquoi certains titres sont devenus cultes, même si leurs mécaniques ont vieilli. Mais ici, on est face à une compilation qui ne fait strictement rien pour accompagner le joueur moderne. C’est comme si on m’avait balancé un vinyle rayé en me disant "tiens, redécouvre ce chef-d’œuvre", sans même m’offrir la platine pour l’écouter.

Techniquement, c’est faible. Les Tomb Raider remasterisés par Aspyr, eux, avaient le mérite d’avoir retravaillé un minimum les textures, les effets de lumière, la fluidité… Ici, on a droit à un simple lissage flou des textures, quelques ajustements de résolution (encore que, pas partout), et basta. Pas de nouvelle interface, pas de travail sur les modèles, pas même de petits ajouts contextuels pour aider à la navigation ou à la compréhension du gameplay. On sent que le moteur d’origine est toujours là, grinçant sous le poids des années, avec sa caméra flottante, ses angles morts et ses collisions bizarres. En 2025, sortir ça tel quel, c’est presque une insulte au patrimoine vidéoludique.

C’est dommage. Parce que Soul Reaver 1 & 2, dans leur fond, restent des jeux intéressants. Le premier pose une ambiance mystique, sinistre, avec son architecture gothique, son univers brumeux rongé par la décadence. L’idée de basculer entre deux plans, le matériel et le spectral, pour résoudre des énigmes environnementales, était brillante à l’époque. Le jeu avait une vraie proposition, une vraie originalité. Le second opus, plus bavard, plus centré sur l’écriture et les boucles temporelles, tente d’approfondir le lore. On comprend pourquoi certains studios modernes (je pense à Vexx, God of War, Dark Souls, voire Darksiders) ont pu s’en inspirer.

Mais la réalité, aujourd’hui, c’est que les jeux sont vides. L’univers donne envie, mais il ne se e pas grand-chose. Les niveaux sont vastes mais désertés, les allers-retours nombreux, les énigmes répétitives. Et cette remasterisation ne fait rien pour corriger ça. Aucune amélioration de rythme, aucune aide contextuelle, aucune simplification intelligente. Les combats sont mécaniques, rigides, et on e beaucoup trop de temps à tourner en rond sans savoir si le jeu bugue ou si c’est juste mal expliqué. Le tout est habillé par un doublage anglais resté très propre, ça je dois le reconnaître, mais qui ne suffit pas à rendre le tout digeste.

Je crois que ce qui m’a le plus déçu, c’est ce potentiel gâché. J’aurais adoré redécouvrir Soul Reaver dans un vrai remake ou, à défaut, dans une compilation respectueuse. Quelque chose qui comprenne qu’on ne joue plus comme en 1999. Là, je me suis retrouvé à jongler entre sauvegardes rapides, accélération d’émulation, et walkthroughs pour garder le fil. C’est pas ce qu’on attend d’un remaster officiel. J’ai fini par abandonner le deuxième épisode avant la fin, vidé par la lourdeur des mécaniques et le manque d’enjeu dans les affrontements.

Et pourtant, j’ai insisté. Parce que je voulais comprendre ce qu’on m’avait vanté pendant des années. (er d'un premier jeu, avec des sauvegardes à volonté, ultra rigide et répétitif, à un deuxième jeu, un poil meilleur, mais avec des sauvegardes sur des totems... Juste non quoi...)

Alors oui, je comprends l’aura culte. Je vois les embryons de mécaniques modernes, les fulgurances visuelles, la narration qui prend son temps. Je comprends que ça ait marqué des joueurs à l’époque. Mais sortir cette compilation aujourd’hui, sans mise à jour, sans ambition, sans respect pour le joueur comme pour le matériau d’origine… c’est pas terrible. C’est du travail de maintenance, pas de transmission.

Parce qu’il y a du fond, mais que cette version ne mérite ni le prix affiché ni l’intérêt d’un joueur en 2025. Un bel exemple de ce qu’il ne faut pas faire avec une œuvre culte, la servir froide, sans préparation, sans amour.